C'est au bras de son fils, la main solidement arrimée à sa canne, qu'est apparue Berthe Foulon. C’était le 29 septembre dernier à l’occasion de la célébration par la municipalité de son centième anniversaire. Et c'est une figure de la commune qui était honorée dans la salle du conseil municipal. Un retour aux sources parmi d'autres pour Berthe qui y siégea pendant 4 mandats (1959-1983) sous l'ère Léandre Létoquart. Fidèle militante du PCF, cheville ouvrière de la cause féministe dans le département, le poids des années n'a pas eu raison d'un caractère inoxydable, blanchi sous le harnais des luttes défendant la cause de ses prochain(e)s. A 100 ans elle demeurait une femme de son temps, aussi incisive que lorsqu'elle bataillait au sein de l'Union des femmes françaises. Lectrice assidue de la presse quotidienne Berthe Foulon est en quelque sorte une bibliothèque de l'Humanité de par son parcours. Cette célébration, permettait également de saluer la mémoire d'un autre pan de la vie de Berthe, son époux Victor Foulon* autre figure avionnaise. Marié par André Parent le 10 décembre 1938, le couple a traversé tant les tempêtes que les joies de la vie. Comme celle d'avoir eu trois enfants, tous investis dans la vie civile, bon sang ne saurait mentir. Ce jour là, une coupe à la main, Berthe savoure le moment. Cette fois la lumière s’est éteinte, définitivement.
* Victor Foulon, mineur investi dans le militantisme syndical et politique, héros de la Résistance, arrêté en 1948 pour sa solidarité envers la grande grève des mineurs, devient président directeur général de la CCPM, le square commémoratif des mineurs d'Avion porte son nom.
A l’occasion de son centième anniversaire, nous avions interviewé Berthe Foulon. Femme, militante, féministe... Le nombre d’années n’a jamais eu prise sur sa fraicheur d’esprit comme son sens du combat.
« Au lieu d'améliorer la vie des gens on ne l'arrange pas du tout »
Vous avez rempli 4 mandats au sein du conseil municipal, c'est une des grandes fiertés de votre parcours de vie.
Oui parce que je participais à la vie de la ville. C'était pour défendre les gens et dans ce cadre il y avait toujours des questions à poser. J'ai toujours été contente d'assister à ces rendez-vous démocratiques.
Vous êtes à l'origine de la création du club La Joie de Vivre, quelles sont les autres actions citoyennes que vous retenez ?
J'étais présidente de l'Union des Femmes Françaises. J'étais donc souvent aux réunions du Comité national. Nous lancions des actions partout pour faire avancer la cause du droit des femmes. Maintenant le mouvement s'appelle Femmes solidaires mais c'est vrai qu'à l'époque j'étais partout.
Le droit des femmes c'est quelque chose qui vous tient encore à cœur !?
Hier je regardais un film sur des filles au lycée, à l'époque où celles-ci commençaient à se défendre, or moi j'ai toujours fait cela. J'ai donc resongé aux délégations de femmes à Arras, aux rencontres avec le préfet.... j'ai vraiment fait cela toute ma vie.
Votre regard sur la situation actuelle ?
C'est très difficile, j'ai peur pour les travailleurs parce qu'avec toutes les mesures qui sont prises et qu'on reprend plus qu'on donne, à prendre plus aux retraités... ça fait peur pour l'avenir. Parce que au lieu d'améliorer la vie des gens on ne l'arrange pas du tout. Je ne sais pas pourquoi on a lutté parce que nous on luttait pour que ça change ! Je regrette mais là aussi les gens ont voté pour eux (l'actuel gouvernement. Ndlr). Maintenant il faut qu'ils réfléchissent parce que ce ne sont pas des gens de droite qui vont donner des possibilités d'améliorations aux travailleurs et à la population.
Vous avez voté lors des dernières élections (par procuration, Berthe ayant connu des soucis de déplacement. Ndlr) son faible taux de participation ne vous inquiète-il pas ?
Si ! Je ne comprends pas, les gens ne sont pas contents, ils votent pour des candidats qui vont leur reprendre ce qu'ils ont acquis par la lutte et bien sûr que ça m'inquiète parce que je me demande quelle société on va avoir. Parce que, nous, on a toujours lutté pour changer les choses, améliorer le sort des femmes, des hommes, de la population. Et quand on voit ce qui se passe, ça fait peur. J'espère que les gens vont se reprendre et surtout réfléchir.
Vous avez été mariée à une figure du monde ouvrier...
Un militant !
… sa cause vous a aussi, sans nul doute, bien accaparé. Militer pour le droit des femmes mais aussi celui des mineurs ce n'était pas un peu trop à la réflexion ?
Mon mari (Victor Foulon) militait c'est peut-être pour cela que je militais plus ! C'est comme un environnement en somme. J'allais à ses réunions, il n'était pas seul moi non plus, ça nous a aidé tous les deux. Victor a beaucoup milité, a été interné pendant la guerre, et cela a beaucoup joué sur moi, c'est avec lui que j'ai appris à m'engager plus. Nous avons eu trois enfants qui eux aussi sont engagés dans le militantisme.
Cela fait quoi d'avoir 100 ans ?
Je ne sais pas, cela fait tout drôle. Je me demande pourquoi je suis allée jusque cet âge, je ne sais pas. Mais je suis contente aujourd'hui, je vois toute l'amitié qu'on me porte et ça c'est beaucoup dans la vie hein ?!